Qualité de l’air : vers plus de transversalité

Le 11 septembre, une table ronde sur la pollution de l'air, organisée par la commission du développement durable de l'Assemblée nationale, a dressé le bilan des principales politiques sectorielles en la matière et passé en revue les leviers d'actions à la disposition des acteurs locaux pour les améliorer. 

Lors d’une table ronde organisée par la commission du développement durable de l’Assemblée nationale, ce 11 septembre, les différentes parties prenantes ont confirmé l’urgence à agir pour lutter contre la pollution de l’air. S’agissant de la qualité de l’air extérieur, si la tendance générale est à l’amélioration, il reste encore des efforts importants à faire, pour espérer lever le contentieux avec la Commission européenne. Par l’adoption, dès 1996, de la loi sur l’air et l’utilisation rationnelle de l’énergie, dite “Laure”, la qualité de ses réseaux de surveillance, ou encore les modalités d’association des différents acteurs, la France a fait figure de précurseur en la matière, reconnaît la secrétaire nationale de France Nature Environnement, José Cambou. Toutefois, l’Etat français ne fait plus à présent partie sur ce sujet des bons élèves de l’Union européenne, déplore-t-elle. Pour les principaux polluants, c’est-à-dire les particules fines (PM10) et les oxydes d’azote, 15 à 20 zones par an sont en dépassement concernant le premier et 20 à 30 zones par an concernant le second, essentiellement dans les grandes concentrations urbaines. En période estivale, l’ozone demeure également un problème dans le quart sud-est.

 

Plans d’actions

Pour répondre à l’urgence sanitaire liée à la pollution atmosphérique – responsable de 42.000 morts prématurées en France chaque année – le gouvernement a présenté le 6 février dernier, un plan d’urgence contenant 38 mesures et confirmé au passage l’enterrement du projet de zones d’actions prioritaires pour l’air (Zapa), que les collectivités ont jugé trop complexe à mettre en place. Le plan Particules, qui prévoit des mesures pour atteindre une baisse de 30% des particules à l’horizon 2015 dans les secteurs de l’industrie, du chauffage domestique et tertiaire, des transports, de l’agriculture et en cas de pics de pollution, devrait par ailleurs être approuvé fin 2014. S’agissant de l’air intérieur, un projet de plan d’action est également en cours de consultation et devrait intégrer le troisième plan national Santé-Environnement.

A l’échelon local, il s’agit désormais d’achever la mise en place des plans de protection de l’atmosphère (PPA). Une dynamique de mise en révision des PPA existants et d’élaboration de nouveaux plans a été lancée. A l’heure actuelle, 36 PPA sont ainsi en cours de révision, parmi lesquels 8 sont déjà approuvés, 12 le seront fin 2013, 16 en 2014. S’agissant des 11 zones en contentieux pour dépassement, les 9 PPA concernés seront tous approuvés d’ici la fin de l’année, assure Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat au ministère du l’Ecologie. L’efficacité des mesures ainsi prescrites repose toutefois sur la mobilisation des acteurs publics, au premier rang desquels les collectivités locales. Face à la multiplicité des sources de pollution et à la complexité des enjeux, les PPA ont l’avantage d’offrir une certaine latitude aux acteurs locaux, permettant d’adapter zone par zone les mesures correspondant aux polluants émis, a relevé le président du Conseil national de l’air, Martial Saddier.

 

Rôle central des Aasqa

La mobilisation des acteurs locaux repose par ailleurs sur les 27 associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (Aasqa) réunies au sein de la fédération Atmo-France. L’originalité du dispositif de surveillance en France réside en effet dans cette gouvernance quadripartite (Etat, industriels, collectivités, associations de protection de l’environnement ou de la santé). Outre leur mission d’information du public sur la qualité de l’air ambiant, ces organismes régionaux jouent un rôle essentiel pour appuyer les collectivités dans l’élaboration et le suivi des outils locaux, à savoir les PPA et depuis la loi Grenelle 2, les schémas régionaux Climat-Air-Energie (SRCAE). Ce rôle d’animation locale ne fait que renforcer la nécessité de pérenniser le financement multiple des Aasqa (38% par l’Etat, 24% par les collectivités, 33% par les industriels assujettis à la taxe générale sur les activités polluantes – TGAP), alors que certaines collectivités semblent se désengager – c’est notamment le cas du département des Hauts-de-Seine qui ne souhaite plus financer Airparif. Le financement du dispositif de surveillance à hauteur de 56 millions d’euros représente en réalité bien peu compte tenu des coûts engendrés par les conséquences sanitaires de la pollution, de l’ordre de 20 à 30 milliards d’euros par an, a remarqué Régine Lange, présidente de la fédération Atmo-France. L’implication des acteurs locaux est d’autant plus indispensable qu’il convient d’aborder la question de la qualité de l’air avec une nécessaire “transversalité”, a-t-elle relevé. Plusieurs échelles territoriales sont concernées (régions, métropoles, départements, intercommunalités, communes) car les leviers d’actions sont divers : transport, mobilité, urbanisme, étalement urbain, chauffage collectif, individuel, gestion des déchets, etc. Les SRCAE mettent ainsi en évidence la nécessité de renforcer les synergies entre les thématiques climat, air et énergie. Plusieurs projets de loi en cours reflètent également cette transversalité. C’est le cas du projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (Alur), du projet de loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, de la future loi sur la transition énergétique ou encore du projet de loi de finances 2014 dans lequel il sera nécessairement question de l’affectation de la fiscalité écologique.

Pour que les Aasqa ne soient pas asphyxiées financièrement et puissent continuer à développer leur rôle d’évaluation des actions et des politiques publiques liées à l’air, la fédération Atmo-France a réitéré lors d’un point presse ce 12 septembre son souhait de disposer de recettes pérennes. Elle juge important de sécuriser le principe de déductibilité des dons d’industriels aux Aasqa de la TGAP due, quelles que soient les évolutions annuelles de cette taxe (taux, nouvelles substances, etc.), tout en révisant régulièrement les plafonds. Surtout, elle propose qu’une partie du produit de toute fiscalité dont on attend un impact positif sur la qualité de l’air – dans le domaine des transports, par exemple – puisse être affectée au financement des Aasqa. “C’est de cette manière que les associations pourront continuer à mener des actions prospectives, hors du strict champ réglementaire, a souligné Régine Lange. Car aujourd’hui, certaines associations qui ont lancé des campagnes sur les concentrations de pesticides dans l’air, notamment, n’ont plus les moyens de les poursuivre.”

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