Transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes : la loi est parue

Refusant aussi bien le statu quo qu'un improbable retour en arrière, la loi promulguée le 5 août dernier, dans la foulée de son adoption par l'Assemblée nationale en lecture définitive, maintient le cap d'un transfert obligatoire des compétences "eau potable" et "assainissement", repoussé au plus tard en 2026 pour les seules communautés de communes.

La loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes est parue au Journal officiel  le 5 août, mettant fin à un parcours législatif débuté il y a près d’un an à l’initiative des députés Richard Ferrand (LaREM) et Marc Fesneau (Modem) pour répondre aux inquiétudes des élus locaux, en particulier dans les territoires ruraux. Le texte entérine la ligne intangible à laquelle le gouvernement s’est tenu tout au long de la navette parlementaire : donner une marge de manœuvre – via une minorité de blocage – aux communes membres de communautés de communes souhaitant différer le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement prévu par la loi Notre au 1er janvier 2020, sans rompre avec la logique de l’emblématique véhicule législatif. Après l’échec de la commission mixte paritaire, les deux chambres sont restées arc-boutées sur leurs positions. Et ce d’autant que la philosophie sur laquelle repose ce texte est bien différente de celle de la proposition de loi défendue par Fabrice Brun (LR) et retoquée par l’Assemblée en octobre dernier. Le report de la date butoir à 2026 représente donc une solution de repli – tout au plus un “répit” réservé aux seules communautés de communes à l’exclusion des communautés d’agglomération – pour le Sénat profondément convaincu qu’il faut maintenir le caractère optionnel du transfert de ces compétences et laisser aux élus locaux la liberté de choix. Pour les maires ruraux, c’est une nouvelle déconvenue. L’Association des maires ruraux de France (AMRF) était revenue à la charge à la fin de l’année dernière en lançant une pétition demandant à ce que l’échelon d’exercice de ces compétences eau et assainissement “soit laissé à l’appréciation des communes”. “Oser dire que la loi votée est finalement un ‘bon compromis’, alors que l’obligation de transfert demeure, est une escroquerie de vocabulaire”, réagit avec virulence l’AMRF dans son communiqué, épinglant “impréparation et obstination dogmatique”, “les deux marques de fabrique” du texte. ” (…) On fixe une date d’échéance irréaliste puis on la reporte sans pour autant prendre en considération les difficultés qu’elle génère au fond, et, ô surprise, on découvre en cours de route que le traitement de l’eau pluviale est un autre sujet !”, critique-t-elle. 


Compromis sur la sécabilité des compétences

Un terrain d’entente a cependant été trouvé sur la gestion des eaux pluviales urbaines (art. 3). Le texte consacre une exception s’agissant des communautés de communes, pour lesquelles l’exercice de la compétence eaux pluviales restera facultative. La gestion des eaux pluviales deviendra en revanche une compétence obligatoire, à compter de 2020, pour les communautés d’agglomération, mais distincte de l’assainissement. D’autres assouplissements ont été concédés par la majorité dans le sens souhaité par le Sénat. Les communes membres des très nombreuses communautés de communes qui ne sont aujourd’hui compétentes qu’en matière d’assainissement non collectif pourront, elles aussi, s’opposer jusqu’en 2026 au transfert du reste de la compétence assainissement en activant le dispositif de minorité de blocage (art. 1er). Quant à l’article 2 – adopté en nouvelle lecture suite à un amendement du gouvernement formulé lors de l’examen au Sénat -, il rend possible la création d’une régie unique multiservices à l’échelle intercommunale, tout en respectant le principe fondamental d’individualisation budgétaire des services d’eau et d’assainissement.


Fin du feuilleton ?

Autre point d’équilibre : le texte prévoit un assouplissement du mécanisme de représentation-substitution, afin de permettre aux nombreux syndicats de se maintenir jusqu’en 2026 si leur périmètre recoupe deux intercommunalités seulement et non pas trois comme auparavant. Cette difficulté a été résolue dès la première lecture par l’Assemblée : l’article 4 supprime ce seuil pour les communautés d’agglomération comme pour les communautés de communes. Le feuilleton pourrait désormais rebondir sur un autre terrain. “Après le report des premières conclusions des assises de l’eau, (…), le prochain combat, c’est la loi de finances”, prévient Fabrice Brun. “Ce n’est pas parce que les intercommunalités détiendront de la compétence qu’elles disposeront de plus de moyens pour investir”, argumente le pugnace député de l’Ardèche, interpellant la ministre, Jacqueline Gourault, sur le coup fatal porté aux budgets des agences de l’eau dans la dernière loi de finances.  

 

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