Riverains d’aérodromes : vers un nouveau système d’aide à l’insonorisation

Fruit des propositions du Conseil général de l'environnement et du développement durable, une nouvelle répartition du produit de la taxe sur les nuisances sonores aériennes entre l'Ile-de-France et les grands aéroports régionaux pourrait voir le jour en 2015. 

Dans une étude, mise en ligne le 10 décembre, le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) préconise de mettre en place, “dès 2015”, un nouveau système d’indemnisation des riverains des aérodromes, tenant compte de “l’urgence de la situation francilienne”. Depuis 1995, le dispositif d’aide est parvenu à insonoriser un nombre significatif de locaux, à savoir 51.000 logements et 129 établissements d’éducation et de santé. Toutefois, un nombre élevé de logements (environ 60.000) restent à insonoriser autour des aéroports franciliens,  pour un montant de 631 millions d’euros avec le taux actuel d’aide à 100% dans toutes les zones de bruit. L’extension du dispositif à l’aéroport du Bourget fin 2011 et les nouveaux plans de gêne sonore publiés fin 2013 pour les aéroports de Roissy et Orly ont en effet augmenté de 45.000 le nombre de logements éligibles. Par ailleurs, les mesures d’augmentation de la prise en charge des travaux – à caractère permanent (opérations groupées, avances de 20%, augmentation des plafonds) ou provisoire jusqu’à la fin 2014 (taux de prise en charge généralisé à 100% au lieu de 80%)- conjuguées à la baisse des tarifs de la taxe sur les nuisances sonores aériennes (TNSA) décidée par arrêté en mars 2013 (pour Paris-Charles de Gaulle -10%, pour Orly -32%) et au plafond de 49 millions d’euros voté en loi de finances 2014 “compromettent l’équilibre financier du dispositif”. Le nombre de logement éligibles est en outre estimé en province à environ 10.000, dont 5.000 autour du seul aérodrome de Toulouse. Il s’agit pour une large majorité de logements collectifs – soit sous forme de copropriétés privées, soit de parc locatif HLM -, le parc de maisons individuelles ayant le plus bénéficié du guichet de la TNSA. Selon ces estimations, les aéroports parisiens représentent 87% des besoins, contre 6,5% sur l’aéroport de Toulouse et 6,5% sur les autres aéroports. Pour le CGEDD, il paraît donc indispensable “d’opérer un transfert de recettes des aéroports de province vers les aéroports parisiens”. 

Modification des tarifs de la TNSA

C’est pourquoi la mission envisage de réduire les tarifs de TNSA des aéroports de province et d’augmenter ceux des aéroports franciliens de façon à accroître leurs recettes de 6,7 millions d’euros sur une année pleine (soit une augmentation de 20%), dans le respect du plafond budgétaire. Pour le président de l’association Ville et Aéroport, Jean-Pierre Blazy, cette préconisation ne va pas dans la bonne direction. La seule position tenable “est de proposer un retour au tarif antérieur de la TNSA en vigueur avant l’arrêté du 13 mars 2013”, estime le député-maire de Gonesse.

La modulation du taux des aides “selon le niveau de bruit et en privilégiant les opérations groupées sur le parc collectif” figure également parmi les propositions du CGEDD. Selon ce scénario, le taux d’aide serait maintenu à 100% uniquement pour les zones I et II des plans de gêne sonore, ainsi que pour les opérations groupées de logements collectifs à condition que ces opérations concernent au moins 60% des logements d’un même immeuble. L’avance de 20% du coût des travaux serait quant à elle maintenue pour tous les bénéficiaires privés.

Le rapport prône par ailleurs une meilleure articulation des aides thermiques et acoustiques qui pourrait être expérimentée à une échelle territoriale dans le cadre de plates-formes soutenues par l’Ademe, permettant “aux collectivités de jouer un rôle d’animation et de suivi et de décloisonner l’action des différents intervenants”. Le cas échéant, les riverains pourraient bénéficier du complément de travaux nécessaire à la rénovation thermique, les travaux étant alors financés entre 70 et 100% par le cumul de l’aide à l’insonorisation et à la rénovation thermique. Une refonte de la grille des aides ainsi qu’une programmation annuelle établie en fonction de trois critères simples (niveau de gêne sonore, type de logement et antériorité de la demande), “avec éventuellement une durée maximale d’attente pour les dossiers non prioritaires”, pourrait guider l’action des commissions consultatives d’aide aux riverains (Ccar). Un rôle “plus stratégique” axé sur l’examen et le suivi de la programmation annuelle leur serait assigné. La délégation de gestion des dossiers d’aide individuelle aux exploitants d’aéroports permettrait en outre de réduire les délais de réalisation des opérations d’insonorisation.


Une transition difficile

La mission attire enfin l’attention sur les difficultés de trésorerie de TNSA des aéroports parisiens apparues en 2014 et, pour au moins 2 années, “qui vont conduire à des listes d’attente pour le traitement des dossiers de 2 à 3 ans jusqu’en 2016”. Pour assurer la transition avec le nouveau système, des mesures d’accompagnement s’imposent, selon le CGEDD qui préconise notamment des avances de trésorerie d’Aéroports de Paris garanties par l’Etat d’au moins 20 millions d’euros. Du côté du gouvernement, un texte est annoncé pour remédier à l’effet ciseau induit par les mesures adoptées depuis deux ans. Pour autant, dans le cadre des discussions du projet de loi de finances pour 2015, les amendements – portés le député Jean-Pierre Blazy – proposant notamment la suppression du plafond de la taxe ont été repoussés. Le secrétaire d’Etat chargé des transports, Alain Vidalies, a néanmoins promis une nouvelle répartition du produit de la TNSA dans le prochain projet de loi de finances rectificative. Il s’est également engagé à publier début 2015 un nouvel arrêté révisant à la hausse les montants de la TNSA pour les aéroports franciliens.

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