Le Conseil d’Etat tranche la question de la domanialité des pistes skiables

Le Conseil d'Etat a rendu le 28 avril un arrêt décisif pour les collectivités propriétaires d'un domaine skiable aménagé en retenant sous certaines conditions le régime de la domanialité publique. 

Les pistes de ski alpin, propriétés d’une collectivité publique (commune, département…), ayant fait l’objet d’une autorisation d’urbanisme pour leur aménagement, appartiennent au domaine public. Telle est la portée de la décision rendue par le Conseil d’Etat ce 28 avril dans le cadre d’une affaire opposant la commune de Val-d’Isère (Savoie) et un syndicat de copropriétaires qui contestait les permis délivrés en 2007 pour la construction d’un bar-restaurant-discothèque partiellement enterré sur une parcelle appartenant à la commune et située au bas d’une piste de ski alpin. Il s’agissait de savoir si les terrains d’assiette de cette construction appartenaient au domaine public ou au domaine privé de la commune. Question “décisive” pour les collectivités propriétaires d’un domaine skiable, l’appartenance d’un bien ou d’un terrain au domaine public déclenchant l’application d’un régime juridique particulier, à savoir celui de la domanialité publique “marqué par les principes d’inaliénabilité et d’imprescriptibilité”, relève le Conseil d’Etat dans un communiqué. Tout projet de construction situé sur le domaine public est en particulier subordonné à une autorisation appropriée d’occupation du domaine public, laquelle doit être jointe à la demande de permis de construire.

 

Autorisation d’aménager les pistes

Pour rappel, il résulte du Code général de la propriété des personnes publiques (art. L.2111-1 et L. 2111-2) que les biens qui sont la propriété d’une personne publique appartiennent au domaine public lorsqu’ils sont affectés soit à l’usage direct du public, soit à un service public, “pourvu qu’en ce cas ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public”. Font également partie du domaine public, les biens constituant un accessoire indissociable d’un bien appartenant lui-même au domaine public. Le juge administratif s’applique à vérifier ces critères pour déterminer l’appartenance au domaine public.
Or, il est de jurisprudence constante, que l’exploitation des pistes skiables constitue un service public industriel et commercial, réaffirme au préalable le Conseil d’Etat. Par ailleurs, l’aménagement d’une piste de ski alpin (travaux de décapage de la terre, terrassement, soutènement et drainage de la piste, défrichement, reboisement des zones concernées etc.) est soumis à autorisation d’urbanisme (en vertu de l’article L. 473-1 du Code de l’urbanisme). Pour le Conseil d’Etat, une piste de ski alpin qui n’a pu être ouverte qu’en vertu d’une telle autorisation remplit nécessairement le critère “d’aménagement indispensable” – en l’occurrence à l’exécution des missions du service public des pistes skiables – posé par le Code général de la propriété des personnes publiques. Il en déduit que les terrains d’assiette d’une piste de ski alpin appartenant à une personne publique et ayant fait l’objet de l’autorisation prévue par le Code de l’urbanisme appartiennent au domaine public de la commune qui est responsable de ce service public. De même le sous-sol de ces terrains fait-il également partie du domaine public de la commune “s’il comporte lui-même des aménagements ou des ouvrages qui, concourant à l’utilisation de la piste, en font un accessoire indissociable de celle-ci”.
En l’espèce, si la piste de ski alpin concernée appartenait au domaine public de la commune, le Conseil d’Etat a toutefois constaté que “la partie visible en surface du bar n’empiétait pas sur la piste elle-même et était ainsi située sur le domaine privé de la commune”. Quant à la partie souterraine de la construction localisée sous la piste de ski, le Conseil a estimé que “ce sous-sol ne remplissait pas lui-même les critères posés par la législation relative au domaine public et appartenait, lui aussi, au domaine privé”. Ecartant les autres moyens soulevés par les requérants, le Conseil a par conséquent infirmé l’arrêt d’appel et rejeté les recours dirigés contre les permis de construire litigieux.
La Haute Juridiction ne s’est en revanche pas prononcée sur la qualification d’autres types de pistes, “telles que les pistes de ski de fond ou les pistes de ski alpin n’ayant pas fait l’objet de l’autorisation prévue par le Code de l’urbanisme”, relève le communiqué.

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