La peine d’inéligibilité en cas de corruption ne sera pas supprimée… malgré les protestations des élus LR

Faire supprimer une peine complémentaire d'inéligibilité obligatoire pour les personnes exerçant une fonction publique en cas de condamnation pénale pour corruption : les députés Les Républicains ont bien essayé, mais ils n'y sont pas parvenus.

Le texte qui a provoqué le courroux des élus LR est celui qui a été modifié en commission des Lois via un amendement du rapporteur Sébastien Denaja (PS) qui “érige la peine d’inéligibilité en peine complémentaire obligatoire en matière d’atteintes à la probité”. Cette proposition est issue du rapport de Jean-Louis Nadal sur la transparence de la vie publique de début 2015.

Seraient concernés par cette peine l’ensemble des manquements à la probité commis par des personnes exerçant une fonction publique (concussion, corruption passive, trafic d’influence, prise illégale d’intérêts, atteinte à la liberté d’accès et à l’égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public, soustraction et détournement de biens) ainsi que la corruption active et le trafic d’influence commis par des particuliers, indique l’exposé des motifs.
La peine d’inéligibilité est en principe de 10 ans pour crime et de 5 ans pour délits.

 

L’inéligibilité c’est pas automatique

L’amendement vise à appliquer “plus fréquemment” cette peine complémentaire, selon le député PS Sébastien Denaja, pour lequel “nos concitoyens ne comprennent plus l’impunité en la matière et que des responsables publics puissent continuer à faire carrière alors même qu’ils ont porté atteinte à la probité”. Pour rendre le prononcé de l’inéligibilité plus systématique, cet amendement en fait une peine complémentaire obligatoire, mais le juge pourra, “par une décision spécialement motivée”, décider d’écarter cette peine.
Il ne s’agit donc “pas d’une peine automatique”, qui serait inconstitutionnelle, ont insisté mardi soir tant le rapporteur que le ministre de la Justice, Jean-Jacques Urvoas, par principe hostile aux peines automatiques.

 

Une “sévérité particulière”

Si les députés LR considèrent que “l’exigence d’exemplarité et de transparence de la vie publique, notamment au travers de l’action des responsables publics et des élus, doit être une priorité”, ils n’en n’ont pas moins plaidé dans l’exposé de leur amendement de suppression qu'”ériger la peine d’inéligibilité en peine complémentaire obligatoire pose la question de sa constitutionnalité”.
L’orateur du groupe Les Républicains, Alain Marleix, a aussi épinglé la “sévérité particulière” de la peine envisagée, sans trop expliquer ce qu’il voulait signifier en creux par cette expression.

En revanche, l’Assemblée nationale a adopté, contre l’avis du gouvernement, un amendement de l’ancienne ministre Delphine Batho permettant à des associations de saisir l’Agence française anticorruption de faits “de corruption, de trafic d’influence, de concussion, de prise illégale d’intérêt, de détournement de fonds publics ou de favoritisme”.

Le gouvernement a, lui, fait supprimer certaines mesures ajoutées en commission, par exemple les dispositions permettant aux repentis de bénéficier d’une exemption de peine pour les délits de tentative de corruption ou de trafic d’influence. « La tentative de ces délits n’est pas punissable, et la loi de 2013 contre la fraude fiscale comporte des mesures proches concernant les repentis”, a plaidé en substance le garde des Sceaux.

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