Dépenses de voirie des collectivités : état général satisfaisant… mais attention aux “engrenages pénalisants”

En dépit de ses enjeux en termes d’économie, de mobilité et d’aménagement du territoire, la voirie des collectivités territoriales demeure mal connue. Ce constat a justifié que trois corps de contrôle de l’Etat y consacrent une mission afin d’examiner son état et ses éventuels besoins de rénovation ou de développement à l’aune des "bonnes pratiques" mises en oeuvre par les collectivités et leurs groupements.

 

 

Si les dépenses dédiées à la voirie locale ont sensiblement diminué ces dernières années, les collectivités territoriales restent globalement attentives à maintenir leur infrastructure routière en état et à y consacrer les moyens budgétaires nécessaires à sa préservation : de l’ordre de 12 milliards d’euros en 2016 (15 milliards d’euros en moyenne par an entre 2010 et 2015). C’est ce que révèle la revue de dépenses portant sur la voirie des collectivités réalisée conjointement par l’Inspection générale de l’administration (IGA), l’Inspection générale des finances (IGF) et le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD).

Il  s’agit d’un poste de dépenses important : 9% des dépenses du bloc communal et plus de 8% des dépenses des départements. Par-delà la grande hétérogénéité du réseau, la mission considère que l’état général de la voirie locale “n’est pas, à ce jour, dans une situation alarmante”. Les investissements importants des départements et, plus récemment, l’engagement des métropoles pour assurer leurs nouvelles responsabilités, expliquent largement ce bilan globalement satisfaisant, malgré des budgets contraints. La baisse constatée de 2013 à 2015 porte pourtant en grande partie sur l’investissement (qui représente les trois-quart des dépenses de voirie), tandis que les dépenses d’entretien courant et d’exploitation ont été davantage préservées.


Points de vigilance

Les chaussés identifiées comme à risque par la mission au cours de ses déplacements sont concentrées le plus souvent “dans des villes moyennes en décroissance démographique et relativement pauvres”. L’état dégradé de la voirie n’est, dans ce cas, que le reflet de difficultés globales, non circonscrites à la voirie, ce qui plaide en faveur “d’instruments de péréquation, plutôt que (par) une hausse générale des dotations de l’Etat”, indique le jaune budgétaire.
Autre point de vigilance : la situation des ouvrages d’art (hors tunnels), “dont le suivi est inégal et le diagnostic de leur état complexe et coûteux”. A cet égard, l’Observatoire national des routes (ONR) créé en janvier 2016 pourrait jouer pleinement son rôle dans cette problématique. La priorité étant plus largement, selon la mission, “la définition d’une méthode partagée de diagnostic et d’évaluation de l’état des routes françaises et la production d’outils et d’analyses pour les EPCI exerçant nouvellement leur compétence voirie”.

Le rapport plaide en outre pour une stabilisation du schéma global qui régit la répartition des responsabilités entre niveaux des collectivités, en particulier au niveau intercommunal, tout en encourageant à davantage de concertation entre gestionnaires du réseau routier, notamment en agglomération. Un autre levier essentiel à la coordination entre responsables des différents réseaux – y compris souterrains – pourrait résider dans l’élaboration d’un règlement national de voirie initié par l’Association des ingénieurs territoriaux de France (AITF).

 

Diffusion des bonnes pratiques

Quant au développement de la voirie, il ne peut être repoussé “ad infinitum”, “puisque le réseau doit évoluer pour s’adapter aux besoins du territoire (accroissement de la démographie, dynamique économique, décongestion, etc.) et à l’évolution des usages de la route”. L’érosion des dépenses dans la durée “pourrait créer des engrenages pénalisants”, alerte ainsi la mission.
Dans une optique d’efficience, la trajectoire financière peut utilement s’appuyer sur les bonnes pratiques mises en place par les gestionnaires de voirie. A la clef, des gains substantiels, “régulièrement supérieurs à 15%, à chaque fois que celles-ci ont été mises en place”. Lors de ses déplacements, la mission a pu en recenser les multiples dimensions : arbitrage entre régie et externalisation sur la base d’une comptabilité analytique ; réévaluation du niveau de service de chaque route en fonction des besoins locaux ; évolution des techniques d’entretien des routes ; mutualisation de la commande publique ; partage des services et outils d’entretien ; mise en place d’une démarche qualité.


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