Concessions hydrauliques : le nouveau cadre juridique au complet

Avec la publication d'une ordonnance et d'un décret d'application, le modèle français des concessions hydroélectriques est désormais fixé. Création de sociétés d'économie mixte hydroélectriques, instance de concertation locale, regroupement des concessions par vallée, les principales réformes actées par la loi sur la transition énergétique associant davantage les collectivités à la gestion des concessions peuvent ainsi être mises en application.

Très attendu, le décret relatif aux concessions d’énergie hydraulique et approuvant le modèle de cahier des charges est paru au Journal officiel ce 30 avril. Il fait suite à l’ordonnance, publiée la veille, venue modifier le Code de l’énergie dans le sens d’une simplification des modalités de gestion des installations hydroélectriques. Ce cadre réglementaire modernisé tient compte des évolutions récentes du droit des concessions, et en particulier des principes de la directive 2014/23/UE relative aux contrats de concession.

Pour rappel, le 22 octobre dernier, la Commission européenne avait adressé une mise en demeure à la France, l’enjoignant d’ouvrir à la concurrence ses concessions hydroélectriques gérées principalement par EDF (80% du parc). Il s’agit donc de répondre aux enjeux soulevés par la Commission dans le contentieux ouvert à l’encontre de la France “dans le respect des principes du modèle français de l’hydroélectricité”, relève le ministère de l’Environnement.

Les grandes lignes de “ces dispositifs novateurs” ont été fixées par la loi relative à la transition énergétique “dans l’objectif de garantir la gestion cohérente des ouvrages, la conciliation des usages de l’eau, la bonne information des parties prenantes et le développement économique des territoires”.

 

Sociétés d’économie mixte hydroélectriques


Le décret expose les différentes options pouvant être mises en œuvre lors du renouvellement des concessions. Il fixe les conditions de regroupement des concessions par vallée lorsque les ouvrages sont hydrauliquement liés. Mais surtout, le texte définit la procédure d’instauration d’une société mixte hydroélectrique (SEMH) associant un pôle d’actionnaires publics à un opérateur industriel, sélectionné à l’issue d’une procédure d’appel public à la concurrence. Les collectivités territoriales riveraines des cours d’eau sont désormais susceptibles de participer à l’exploitation d’une concession renouvelée en qualité d’actionnaires, sous réserve du respect “des compétences qui leur sont reconnues par la loi en matière de gestion équilibrée des usages de l’eau, de distribution publique d’électricité ou de production d’énergie renouvelable”. Autre critère posé : “la capacité des demandeurs à assumer les besoins de financement projetés de la future concession”.

 

Instance de concertation locale

Là où les concessions ne feront pas l’objet d’une SEMH, le préfet pourra créer une nouvelle instance de concertation locale : le comité de suivi de l’exécution de la concession et de la gestion des usages de l’eau. Facultative, la création d’un tel comité est en revanche de droit pour les concessions regroupant des ouvrages dont la puissance excède 1.000 mégawatts. A noter, la commission locale de l’eau, lorsqu’elle existe, tiendra lieu de comité de suivi, associant, à cet effet, des représentants du concessionnaire, ainsi que des représentants des collectivités et leurs groupements “éventuellement situés en dehors du périmètre de la commission locale de l’eau si le périmètre de la concession est plus large”.
Via ce comité de suivi, collectivités et riverains seront ainsi consultés “préalablement à tous travaux ou opérations faisant l’objet d’une procédure d’autorisation”, sur le “projet de règlement d’eau” (au stade de son élaboration ou de sa modification), ainsi que sur les modifications du contrat de concession “de nature à entraîner des dangers ou des inconvénients significatifs” et plus largement sur “toute décision ayant un impact significatif” sur les enjeux de la politique énergétique. Il appartient également au concessionnaire de tenir informé le comité, le cas échéant, de “l’élaboration du plan particulier d’intervention” et de “tout incident ou accident dont les conséquences sont susceptibles d’atteindre l’extérieur du périmètre de la concession” Un bilan annuel de l’exploitation de la concession lui est par ailleurs adressé et, le cas échéant, “une synthèse des études relatives à l’environnement réalisées”.

 

Cahier des charges type


Le texte s’attaque également à un autre chantier, celui de l’actualisation du modèle de cahier des charges des concessions hydrauliques pour l’adapter “aux pratiques actuelles en matière de contrats de concession de service public”. Cette trame – annexée au décret – pourra être adaptée et complétée “afin de prendre en compte les spécificités de chaque concession”. Les redevances auxquelles sont assujettis les concessionnaires, précédemment définies par le modèle de cahier des charges, sont désormais fixées au niveau réglementaire. Pour les modalités de calcul de la redevance proportionnelle aux recettes de la concession, le cahier des charges continue toutefois de faire référence. Affectée pour un tiers aux départements, cette redevance est désormais répartie, à hauteur d’un douzième chacun, entre les communes et leurs groupements sur le territoire desquels coulent les cours d’eau utilisés.
Enfin, un dernier volet du décret modernise les règles relatives à la sécurité des ouvrages hydrauliques concédés, par référence aux règles définies dans le Code de l’environnement (classement des barrages, études de dangers, rapport de surveillance).

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